The Artificial Girl, premier petit film d’anticipation de Franklin Ritch (ici aussi scénariste, acteur et monteur), et qui s’inscrit dans la digne lignée d’œuvres comme Cube ou Primer, en cela que tout en sous-entendant des concepts ambitieux, ils le font pourtant à travers des séquences simples, extrêmement faciles à produire. Et ici il s’agit d’une réflexion sur l’intelligence artificielle, découpée en trois longues séquences, propre au genre du huis-clos : d’abord un homme se fait interroger par deux agents du FBI quant à une petite fille qu’il utiliserait pour piéger des pédophiles sur internet. Sauf que, twist du premier acte, l’on comprend que cette petite fille n’existe pas et qu’elle est une intelligence artificielle créée par le héros. Deuxième acte du film : suite à une longue ellipse de plus de dix ans, l’on retrouve le personnage principal, désormais collaborateur du FBI, qui accompagné des deux agents, se posent une question éthique. Doivent-ils « libérer » l’intelligence artificielle, à savoir la petite fille qui depuis dix ans les aide à coincer des pédophiles, en lui conférant un vrai corps ? Troisième acte, suite à une ellipse encore plus grande, on retrouve le héros (désormais non plus joué par le réalisateur, mais par Lance Henriksen, choix ironique quand on sait qu’il est devenu célèbre pour avoir incarné, précisément, une intelligence artificielle dans Alien), face à l’intelligence artificielle qu’il a créée, devenue une vraie personne, figée pourtant dans un corps d’enfant (ce qui rappelle Kirsten Dunst dans Entretien avec un Vampire), et ravagée par ces décennies à côtoyer les pédophiles. Le tout se terminant par une séquence assez bateau de l’intelligence artificielle se mettant à danser, pour exprimer sa pureté – un autre film donc à ajouter dans la liste des œuvres se terminant sur de la danse à défaut de savoir quoi dire. Mais heureusement l’actrice l’interprétant, la jeune Tatum Matthews, est vraiment bien. Bref, rien qui soit digne de Cube dans ce film, d’autant que le tout paraît bien souvent trop cérébral, trop conceptuel, pour nous emporter. Mais l’on sent constamment les limites du budget et malgré le peu d’intérêt que l’on éprouvera pour le principe du film, pour sa mise en scène et sa structure (le triple huis clos), il faudra reconnaître que le film réussit à créer quelques beaux moments, comme lors de la fin (qui nous rappellera le réussi Marjorie Prime avec Jon Hamm). Le problème de The Artificial Girl néanmoins est en même temps sa qualité : c’est qu’il tombe à pic. Sorti en 2022, il est arrivé exactement quand le monde était pris de plein fouet par l’arrivée de chatgpt puis, dans la foulée, de midjourney. Sauf que les progrès ont été si rapides, si exponentiels, que regarder le film en 2024 paraît presque désuet : plus rien n’impressionne, plus rien ne déstabilise. Aussi, l’écueil du film est l’écueil précisément qu’il tente de surligner dans sa narration : c’est celui de la singularité technologique. C’est celui du progrès, que l’on croit loin en arrière, mais qui fonce vers nous à la vitesse d’un TGV, et qui une fois à notre niveau, nous a déjà dépassé en quelques secondes. C’est le cas de The Artificial Girl : il est sorti au moment où l’intelligence artificielle arrivait à notre niveau. Et elle est déjà loin, bien loin, en avant à présent. 1,5/5.
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