Red Road

Red Road, au style très semblable à Fish Tank, toujours d’Andrea Arnold. On y retrouve le parcours d’une femme seule, à la recherche d’un Autre, dans la grisaille britannique ; on y retrouve, aussi, ce même retournement de situation transformant le troisième acte (à savoir que l’héroïne s’était en fait rapprochée de l’assassin de sa famille pour l’accuser de viol). Où le bât blesse, toutefois, c’est qu’Arnold semble être passé à côté de son vrai sujet, du véritable film qu’annonçait son récit – car l’on trouvait passionnant ce principe de suivre une contrôleuse des caméras d’un quartier ; cette idée, de surveiller un bloc de rues précises, au point de connaître parfaitement ses gens et leurs habitudes, de s’attacher à l’homme qui sort son chien malade ou l’employée qui danse le soir dans son bureau ; il y avait là vraiment un contexte, un personnage, une profonde originalité, d’autant que, dès la première scène, Arnold faisait le pari très fin de ne pas aborder ce principe de surveillance de par sa violence et sa noirceur, mais par sa poésie et l’affection de l’observation, du plaisir de la solitude, de la présence invisible. Malheureusement, dès que l’héroïne retrouve l’assassin de sa famille, on quitte complètement ce contexte ; on la suit alors qu’elle sort de sa cabine, qu’elle s’engouffre dans l’appartement de cet homme, et le tout ne devient plus qu’une banale histoire de perte, de deuil et de regret (enluminée, certes, par un contexte original et un retournement de situation amer, mais quand même). Au final, on ne peut se défaire de cette impression qu’Arnold est passée à côté de son film (et c’est d’ailleurs, voilà qui est très évocateur, comment le film se vend et se présente : comme l’histoire d’une surveillante, et pas comme un film à la 21 grammes) ; on regrette, quitte à jouer du retour de cette présence assassine, que sa poursuite ne se soit pas plus longtemps maintenue à travers les caméras, dans le doute de sa véritable existence ou d’une consistance davantage fantomatique. 2/5.