May December, sur une histoire à la Brigitte Macron, à savoir sur une professeure qui a couché avec son élève, vingt-cinq ans plus jeune qu’elle, et qui a ensuite quitté son mari pour faire sa vie avec lui et avoir des enfants. Mais ce qui est intéressant, ici, c’est que l’on ne suit pas l’histoire au présent, dans le scandale ou le drame, mais a posteriori, vingt ans après, alors que la femme (Julianne Moore) et l’ancien élève voient désormais leur plus grand fils, âgé de dix-huit ans, quitter la maison familiale pour aller à l’université. Et ce choix de la temporalité est très fin : il permet à la fois de mettre en exergue l’étrangeté de la différence d’âge entre la femme et l’homme, à travers une différence d’âge encore plus étrange, à savoir celle entre le père et son fils (et en cela, la séquence sur le toit, où l’enfant apprend à son père à fumer de l’herbe est belle et poétique : elle incarne, en quelques minutes, le drame de cet homme-enfant, qui n’a jamais pu vivre sa jeunesse, qui a été vampirisé, et qui en voyant son fils quitter la famille, voit sa propre jeunesse disparaître, comprenant qu’il en a été privé). Mais où ce choix du décalage temporel est parfaitement compréhensible, le choix du décalage de point de vue, dédoublant donc le décalage, l’est un peu moins. Car pourquoi avoir donc choisi d’aborder le film via le regard de Nathalie Portman, à savoir l’actrice qui va camper le personnage de Julianne Moore dans une adaptation cinématographie en préparation ? L’on comprend, certes, le but : à savoir que d’un côté le père est confronté à la jeunesse de son fils, jeunesse qu’il n’a jamais eue, tandis que Julianne Moore elle doit faire face à son propre passé, à son propre jeunesse elle aussi perdue, qui s’incarne à travers Portman. Mais parfois, cela semble un poil trop conceptuel, trop faux, pas assez nécessaire. Peut-être aurait-il fallu, pour ce faire, des actrices plus habitées, plus dérangeante que Portman ou Moore : non pas qu’elles soient mauvaises, mais quelque chose semble manquer dans leur interaction, dans leur relation, dans leur alchimie. Enfin, l’histoire est suffisamment passionnante, fascinante, pour que l’on vienne superposer dessus cette histoire de metafilm, de film dans le film, et pour que cela paraisse vraiment essentiel, il eût fallu que la relation entre Portman et Moore, que la performance des actrices, transcendent et dépassent la puissance de la narration initiale. Or ce n’est jamais le cas, et on a parfois l’impression que cela demeure un obstacle dans le film, une force de pose prétentieuse qui floute et l’obscurcit. Mais peut-être faudrait-il le revoir pour davantage en être certain, car l’on demeure tout de même assez curieux de cet étonnant choix narratif. Étrange, dans tous les cas. 2,25/5.

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