Anomalisa, dont le visuel, malgré le nom de Charlie Kaufman à l’écriture et à la réalisation, m’avait jusqu’alors quelque peu tenu à l’écart – mais le principe du film, et cette maladie du héros faisant qu’il voit et entend les autres exactement de la même façon, prend véritablement son sens dans l’animation. Et même si le film s’avère probablement le plus dépouillé, le plus court, le moins ambitieux de la carrière de Kaufman, il n’en est pas moins très beau. Avec, vraiment, en point d’orgue cette façon de représenter l’amour, à travers cette femme, petite, ronde, aux pensées volontairement banales mais pas totalement idiote (« je pense que Cindy Lauper est vraiment très courageuse d’être elle-même ») – parce que ce traitement comporte à la fois cette beauté de la femme qui dénote, même de très loin, parmi l’immensité d’un hôtel, et à la fois cette pure honnêteté, malgré tout, de sa néanmoins terrible platitude. Comme si on tombait amoureux par dépit de ne pouvoir tomber amoureux des autres, comme si l’on tombait amoureux de ceux dont on peut voir avec plus de précision les raisons de l’insignifiance perpétuelle ; comme si on tombait amoureux des gens dont on pouvait encore distinguer la banalité. Évidemment, on regrettera un peu qu’après une œuvre aussi riche, pullulante et grandiose que Synecdoche, New York, il ait fallu attendre sept ans pour un simple film animé, presque trop limpide, d’une heure quinze… mais le système est ainsi fait. Rien qui ne soit quasiment parfait dans cet Anomalisa. 4/5.

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