L’Amour Ouf, qui malgré ses quelques bêtises a pour lui de posséder une histoire mignonne et vraiment bien montée, très rythmée. Certes, les facilités sont nombreuses, autant dans le fond que dans la forme : la réalisation outrageusement léchée, clipesque, de Lellouche, assomme souvent dans son désir de trop bien faire, d’en mettre plein les yeux, sans pour autant jouir d’une identité propre (les références américaines, jusqu’à d’ailleurs l’utilisation de Jon Brion à la bande-son, sont nombreuses et évidentes). De la même façon, la narration réduit souvent l’ambiguïté potentielle des personnages : on regrettera, par exemple, que le personnage de François Civil soit une victime si évidente lors du casse (évidemment, il n’y est pour rien, évidemment, il tombe pour les autres, évidemment il voulait sauver le gentil policier). Vincent Lacoste, également, semble ici mal casté tant son personnage est une caricature du mec faible et frustré, uniquement là pour faire obstacle à l’amour véritable du récit, et on a beau aimer Lacoste, son corps maladroit fait doublon avec la nullité molle du personnage : l’on aurait préféré, à choisir, qu’il soit ou campé par un personnage viril, histoire de créer un véritable conflit, ou alors qu’il soit tragiquement conscient de n’être ici qu’un second rôle (exactement comme le beau personnage de Past Lives, ce mari lui aussi coincé entre sa femme et son amour de jeunesse).

Mais peu importe ces écueils du film (qui servent sans doute de lubrifiant pour mieux glisser dans la bouche du spectateur les qualités du film qui lui ont permis d’être un tel carton), car en vérité L’Amour Ouf est un bon film. Il est plein de détails, d’intuitions, réels et sensibles, particulièrement dans la première partie, celle de l’adolescence, où tous les jeunes acteurs sont brillants (souvent plus d’ailleurs que Civil, Exarchopoulos et Quenard), et encore plus lors des séquences avec Alain Chabat, génial en père célibataire et qui ici livre la prestation de sa vie. L’on adorera en cela le climax de l’adolescence, avec cette scène de l’éclipse, belle car autant allégorique que dialectique : c’est ici à la fois la perte de l’innocence qui s’exprime (on part dans la zone obscure) que l’amour (ils s’embrassent loin des autres au lieu de regarder la lune passant devant le soleil). Au bout du compte, malgré les clichés un peu trop appuyés de la seconde partie, l’on sera même séduit par la fin, toute simple, avec ce couple qui survit à tout, désormais heureux en vendeurs chez Auchan. Bref, un succès mérité. Et logique. 2,25/5.

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