Mr. Ripley et les ombres, l’une des suites de Ripley adaptées au cinéma. Et décidément, cet univers est fascinant et mériterait d’être davantage étudié : car non seulement L’Ami Américain de Wim Wenders est une adaptation du troisième roman de Ripley, mais le deuxième, Ripley et les ombres, est donc lui aussi un film, avec le toujours excellent Barry Pepper dans le rôle titre. Après donc avoir retrouvé l’américain imposteur en Italie (et avant de le recroiser, dans le troisième volet, à Berlin, c’est en cela de toute façon une intéressante structure, que cette idée de l’américain, allant en Europe de pays en pays pour adopter leur nationalité successive), on le suit ici en Angleterre, dans le milieu de l’art contemporain. Certes, la narration a peu d’intérêt, copie conforme du premier livre qui permet à Patricia Highsmith de reproduire sa formule rondement concoctée. Comme d’habitude, Ripley introduit un cercle d’ami, en tue certains, tente de jouer un rôle qui n’est pas le sien (ici celui d’un peintre londonien), tout en devant se dépêtrer des animaux, ces curieux témoins silencieux avec lesquels Highsmith avait décidément un don pour jouer (ici, après le chat Lucio, ce sont trois chiens, l’un d’eux s’appelant Nietzsche). Variation, toutefois ici, qui rappellera Dexter : rapidement, Ripley tombe amoureux d’une femme, en fait aussi perverse que lui, et va finalement trouver en elle une partenaire de crime (le film se terminant sur leur mariage, qui est une arnaque à l’encontre des parents de la mariée). À part cela, le film n’a pas le charme esthétique, l’atmosphère, de la série (évidemment pas), ni même des films avec Damon et Delon. Mais pourtant, il est plus agréable, plus profond, que les deux derniers : sans doute parce que le personnage de Ripley y est plus respecté, ni un simple arnaqueur pour contenter Delon (qui devait avoir peur de passer pour un gay) ni un jeune complexé (pour faire de Damon le héros d’un récit d’apprentissage). Ici, c’est le Ripley qu’on aime : un homme sûr de lui et en même temps étrange, insaisissable, libre de la narration et du récit. Car c’est la beauté du personnage : c’est qu’il vit au-delà des identités et des histoires. Et pour incarner sa profondeur, sa singularité, l’histoire doit l’embrasser, s’y adonner. Ce n’était pas le cas, avec Damon et Delon. C’était le cas de la série et c’est le cas, ici. De ce fait, sans pourtant le moindre effort de mise en scène (de plus, le Mentmore Towers, vu notamment dans Batman Begins et dans de tas de films, ne contribue pas à apporter davantage de charme ou d’originalité au film), eh bien l’on regarde Mr. Ripley et les ombres comme l’on regarderait une série. Sans aucun ravissement, mais avec le vrai plaisir de retrouver un personnage que l’on aime. 2/5.

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