La Vie Rêvée de Miss Fran, dont je garderai un souvenir empreint d’affection, parce que j’avais à ce moment une vie compliquée, mais le temps d’un instant, j’ai laissé mon épuisement apaiser mon corps sans pour autant m’endormir. Dans mon journal, j’ai écrit à propos du film que c’était une œuvre déterminée, adorable et oubliable, rayonnante dans sa petitesse, et je maintiens ces mots. En vérité, j’avais choisi d’aller voir ce film par pur hasard, et cela rend ma sympathie pour lui encore plus forte : il était discret, presque invisible, diffusé dans ce MK2 de Bastille où je ne suis que rarement allé, et je ne savais rien de lui. Encore aujourd’hui, je ne connais pas sa réalisatrice, ni aucun membre de son casting, si ce n’est évidemment Daisy Ridley. Il est de plus assez difficile de le décrire ou d’émettre un quelconque jugement définitif à son sujet, tant il est à l’image de son personnage principal : délicat, immobile, renfermé. Ridley est en effet une employée de bureau, timide compulsive, éternelle célibataire, dont on ne sait à peu près rien, si ce n’est qu’elle finit par se lier à son nouveau collègue de travail, à travers des discussions sur slack. C’est exactement le genre de film que j’aimais regarder autrefois, sur les environnements d’openspace, dans des petites villes américaines absurdes et impersonnelles : j’aimais, à distance de l’âge adulte, l’aborder dans sa nature grise, calibrée, structurée. Mélancolique, aussi. Comme par exemple dans Monsieur Schmidt d’Alexander Payne. Et ce n’était pas plus mal, à ce stade de ma vie, que j’y replonge un instant : ainsi, les séquences de réunion, de pause déjeuner, et de fêtes à la maison se succèdent. La structure est classique : Ridley n’arrive pas à s’ouvrir, se montre blessante parce qu’elle a peur d’exprimer ses sentiments, finalement ils se comprennent. Bref, jamais rien de surprenant, et à de nombreux égards, le film assume cela parfaitement, avec calme et flegmatisme : même ses visions, que l’héroïne a quand elle est prise d’élans suicidaires, demeurent lentes et silencieuses. C’est un film mignon, aussi audacieux au bout du compte : audacieux dans sa volonté, jusqu’au bout, de ne pas sortir du rang, de ne pas parler trop fort, d’oser risquer l’invisibilité. On dirait presque parfois que l’on regarde un film qui ne voudrait pas être vu. 1,5/5.
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