Past Lives, qui dans sa première partie m’a particulièrement inquiété, tant j’y ai retrouvé tout ce que je redoute dans le cinéma asiatique : à savoir un récit centré sur le vide et la posture enfantine. À défaut de pouvoir travailler la profondeur et le sérieux, l’enfance est située comme une source, une origine d’Absolu, et on déroule tout autour une histoire idiote qui n’a pour finalité que le néant et l’absence de définition (puisque, l’enfance, ce n’est pas « la pureté » : c’est ce qui n’existe pas, c’est la surface). Bref, avec ce petit récit sur la nostalgie, j’avais l’impression d’assister à une vulgaire publicité de Noël. Mais quand le film se déplace aux États-Unis et que l’on retrouve les personnages adultes, j’ai été séduit et emporté par le film. Tout commence avec l’arrivée du héros à New York, à travers une séquence brillante, sous la pluie, où la mise en scène comme la musique paraissent brutalement être haussées d’un cran. Puis le film enchaîne les séquences fortes, souvent longues, approfondies, comme celle au bar, à trois (avec l’excellente « You Know More than I Know » de John Cale), ou encore celle entre l’héroïne et son mari, dans leur lit, alors que ce dernier, qui aurait pu apparaître comme l’obstacle facile à détester pour le spectateur est parfaitement traité, devenant réel, tangible, et donc tragique. Et la fin brise le cœur : quand, après avoir raccompagné le héros à son taxi, l’héroïne repart dans la rue seule vers chez elle. Durant tout le film, elle s’est contenue, durant tout le film, elle a été celle qui a le moins exprimé ses sentiments. Mais quand alors, durant ce long chemin à rebours de ce que l’on voudrait, elle finit par sangloter, retrouvant ses pleurs d’enfant, avant d’être réconfortée par son mari, l’on craque. L’on est au bout du bout, et l’on sera gré à la réalisatrice, ici, d’avoir la pudeur de ne pas enfoncer le couteau plus loin : elle se retient, elle ne cherche même pas à nous torturer, et son talent apparaît alors évident, d’autant plus évident et incontestable que la première partie de son film était ratée. Or malgré cela, sa puissance émotionnelle brille de mille feux, elle surmonte son principe nostalgique pour s’élever au-dessus de lui et le révéler comme ce qu’il est réellement : non pas une nécessité ou une source, mais un cœur sur lequel la vie réelle grandit. Avec ce constat : l’amour, ce n’est pas l’enfance, c’est ce qui dans le cœur de l’adulte le surmonte. Très prometteur pour un premier film… 2,25/5.

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