The Wind Rises, plus réaliste, épuré et mature que Le Voyage de Chihiro, et en se dénudant ainsi, Miyazaki révèle inéluctablement ses inaptitudes déjà flagrantes dans Princesse Mononoké. À savoir que c’est un artiste dénué de profondeur, d’originalité et qu’il est incapable de construire un récit, de remonter le flux, le battement, de l’art jusqu’à sa source. Miyazaki a pourtant des talents, qui me sont parus évidents dans Le Voyage de Chihiro : c’est un homme d’idées fugaces, un homme aussi capable de fulgurances, de capter et de représenter de grands mouvements oniriques. En réalité il est un peu comme ces joueurs de football limités techniquement, mais qui s’épanouissent dans la multiplication des efforts, qui plus ils tentent, plus ils proposent, plus ils parviennent à peser sur le match de par leur générosité (Miyazaki est en somme une forme de Blaise Matuidi). Mais quand il s’agit de s’économiser, de jouer peu mais précis, de cesser de se cacher derrière le déploiement d’images, cela devient plus compliqué. Et dans The Wind Rises, dans cette grande histoire de rêves avortés et d’amour abandonné durant la seconde guerre mondiale, Miyazaki ne fait plus illusion. Le départ, pourtant, avec les ambitions du héros, qui veut devenir un constructeur d’avion, avait sa beauté : l’on aimera particulièrement quand Miyazaki réunit la beauté onirique du rêve à la réalité pourtant concrète de celle-ci, aux plans, aux schémas, aux boulons. Mais une fois l’histoire d’amour commencée, on est scié : le héros est vide et bête, la fille qu’il aime est vide et bête, leurs dessins comme d’habitude sont hideux et sans âme, et leur rencontre et l’évolution de leur rencontre repose sur des deus ex machina aberrants. Les références de plus à La Montagne Magique sont à côté de la plaque et renforcent Miyazaki dans sa posture d’enfant amateur, qui tente d’assembler un peu au hasard telle idée, telle inspiration, sans jamais former un tout cohérent : ces films sont ainsi dénués de toute réalité, de toute nécessité. Ce ne sont pas des œuvres de l’imaginaire, mais des œuvres de la fantaisie. Des œuvres du hasard. Quand ce hasard s’exprime à travers la folie continuelle, sans but, sans fin, du rêve, comme dans Le Voyage de Chihiro, cela est beau. Quand il veut se mettre au service d’un sens profond, primordial, comme dans Princesse Mononoké ou The Wind Rises, c’est grotesque. 1/5.

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